Coup de foudre

Ce soir là, je suis nerveuse, bien plus que d’ordinaire. C’est un peu par défi que j’ai accepté de te rencontrer, après quelques simples lignes échangées sur la messagerie privée. Ta courtoisie et ta force de persuasion ont réussi à me convaincre de te rencontrer lors de ton passage sur Bordeaux.

C‘est sur les quais de la Garonne que nous nous sommes donnés rendez-vous. Il y a du monde ce soir-là, tu m’informes par message que tu cherches une place pour te garer. Il fait plutôt doux en ce début du mois de février ; je tente de calmer ma nervosité en faisant les cent pas, l’appréhension et le trac montent, ça m’apprendra d’agir sur un coup de tête !
Une voix semble murmurer mon prénom, je me retourne, c’est toi !
Mon sang ne fait qu’un tour ! Mes jambes tremblent, j’ai l’impression d’être transpercée par ton regard et ton sourire. Je suis comme paralysée, incapable de bouger, mes yeux bloqués dans les tiens.
– Bonsoir Christel !
– Bonsoir !
Tu t’avances; je sens ton souffle chaud, ton parfum m’enivre, j’ai envie de t’embrasser, de me serrer contre toi, d’être à toi, là tout de suite, sur le trottoir ! Je ne comprends pas ce qui m’arrive.
– Est-ce que tu vas bien ?
– Je ne crois pas !
– Tu es déçue ?
– Surprise serait plus approprié.
– Souhaites tu toujours me servir de guide ou préfères tu un autre programme ?
– Je vais tenir mon engagement et te faire découvrir le Différent.
– Vraiment ?
– Oui ! Enfin si j’arrive à reprendre le contrôle de mes jambes et de mon cerveau.
– Je ne voulais pas te perturber à ce point.

Toi, quadragénaire, impeccable dans ton costume, des cheveux poivre et sel, tu me troubles au plus haut point. Je t’indique la direction à prendre, et tout en entamant une discussion, tu me prends la main, pour m’entraîner dans les rues bordelaises en direction du club. Je te suis, je t’écoute, tu es envoûtant.  je bois tes paroles, je ne suis pas dans mon état normal.
Un sursaut de lucidité me ramène à la réalité en rentrant dans le Différent. Rémi nous y accueille. Nous discutons quelques minutes de la soirée de février avant de rejoindre les vestiaires pour remplacer nos vêtements par une grande serviette.
– Tu viens souvent ici ? Tu es une star.
– J’aime bien ce lieu, ils me connaissent, mais je ne suis pas une star.
– Tu en es une sur le forum !
– Je participe comme tout le monde.
– Tu es appréciée, soutenue, protégée ; tes écrits sont suivis, c’est presque intimidant de me retrouver face à toi ce soir.
– C’est toi qui a insisté !
– Oui ! Et je suis sous le charme de Christel.
Nous venons de faire le tour des lieux, mais je doute que tu ais été attentif à la visite. Nos mains sont restées l’une dans l’autre, je me sens bien en ta compagnie, ça semble si facile…
C’est dans le jacuzzi que nous nous installons, il n’y a quasiment personne. Nous discutons doucement ou plutôt, tu discutes et je t’écoute attentivement, le sourire aux lèvres. Je ne me rends même pas compte que nous nous collons l’un à l’autre, comme aimantés. Et lorsque tu oses enfin approcher tes lèvres des miennes, des frissons me parcourent entièrement telle une décharge électrique. Ta langue vient chercher la mienne, elles dansent ensemble, nos corps se rapprochent encore, tes bras m’enlacent, je m’abandonne toute entière à cette étreinte passionnée.
L’heure tardive nous ramène doucement à la réalité, le club ne va pas tarder à fermer. Nous filons à la douche où je te laisse me savonner sans un mot, mon regard noyé dans le tien. Nous quittons le club main dans la main, en silence. Les rues sont désertes, ma tête est embrouillée, je n’ai pas envie que la soirée s’arrête aussi vite, je n’ai pas envie de te voir repartir.
– Veux-tu m’accompagner à mon hôtel ?
– D’accord, je te retrouve là-bas, je ne vais pas laisser ma voiture ici.
– On se suit ?
– Oui !

Ma voiture n’étant pas loin de la tienne, et je te rejoins rapidement. À cette heure, les quais sont déserts, et la rocade bordelaise entièrement fluide. Le trajet se fait sans encombres. Je ne comprends pas ce qui se passe, pourquoi suis-je ainsi attirée ? Pourquoi mon cœur bat-il de la sorte ? pourquoi ai-je autant envie de toi alors que je te connais à peine ?
Sa chambre est grande et confortable ; je me retrouve un instant intimidée, ne sachant que faire, imaginant même prendre mes jambes à mon cou tant qu'il en est encore temps. Tu me rejoins, sourire aux lèvres, m’enlace avec tendresse avant de prendre possession de ma bouche longuement. Mes craintes éphémères s’évanouissent aussitôt ; mes bras s’accrochent à toi. Un par un, nos vêtements tombent sur le sol, tandis que nos corps se laissent choir sur le lit. Ta bouche parcourt chaque centimètre de ma peau, la faisant frémir sous chaque baiser déposé. Lorsque tu te perds dans mon entrejambe, des gémissements se font entendre, te donnant envie d’explorer mon intimité plus longuement. Mes doigts s’accrochent aux draps, à tes cheveux. Un orgasme me transperce de toutes parts, je gémis, je crie sans aucune retenue. Tu vient m’enlacer, m’embrasser, nos regards se croisent, nous voulons la même chose. Tu me pénètre en douceur, et entame de légers va et vient. Ta jouissance ne tarde pas, entraînant la mienne ; nos corps ne se quittent pas, mon cerveau a disparu, nous nous endormons sans même nous en rendre compte.

Un éclair de clairvoyance m’avait poussée à mettre une alarme, et c’est cette dernière qui me sort de mon sommeil profond. Je ne sais pas où je suis, ai-je rêvé ?
– Bonjour Christel.
– Bonjour ! C’est donc réel.
Un doux rire vient animer la chambre et tes baisers ravivent la braise.
– Il faut que je m’en aille !
– Je sais mais ça ne m’enchante pas.
– Moi non plus, mais je n’ai pas le choix.
– On va se revoir.
– Je l’espère.
– J’ai un cadeau pour toi que j’ai oublié de te donner hier. Il n’y a pas que toi qui a été perturbée, j’en ai oublié mes bonnes manières.
– Il ne fallait pas.
Je me lève pour attraper mes affaires et file dans la salle de bain. Lorsque j’en ressors, tu m’attends avec une jolie plante fleurie dans les mains.
– Merci !
– Je t’en prie, ce n’est rien, j’aimerais t’offrir tellement plus.
Tu m’embrasse encore, je ne veux pas partir, mais je suis en retard. Je te pousse gentiment, attrape mon sac et sort de la chambre presque en courant,  sans me retourner. Je rentre à la maison avec une sensation douloureuse, tu me manques déjà ! Mon corps te réclame, je ne me reconnais plus. Qu’as-tu fait de moi ?



« Sacrée CHRISTEL !… L'avez-vous déjà rencontré ? Elle me fait penser à une colombine assise sur la lune. On dirait toujours qu’elle vit dans un univers cotonneux. Avec ses yeux bleus comme  l’Océan, toujours un petit regard en coin et émerveillé quand on lui parle. On dirait une petite fille espiègle, et souriante lorsqu’elle a fait une bêtisé. Elle est coquine et belle dans sa façon de faire. Nos rencontres ont toujours été que du bonheur, un réel plaisir, et de grandes partis de fous rires…… À toi Christel.  Kili »
Ce mot sur le forum me fait rougir de plaisir, repensant aux tiens sur « la star que je représente  aux yeux de certains ». Le message qui suit me fait vibrer davantage, jamais je n’aurais cru que tu oserais :
« Oui Kili je partage tes sensations. Quel plaisir de se laisser bercer par le sourire de Christel, de se noyer dans son regard chargé d'émotion, de voyager avec ses éclats de rire. Douceurcâlin »